Dans cette année 2020 qui a exigé de chacun d’entre nous une adaptation de chaque instant, la vigne nous a une fois de plus prouvé qu’elle savait se transcender face aux conditions climatiques.
Confiance et audace, basées sur l’expérience et la connaissance de notre vignoble, nous ont permis de l’accompagner au plus près et d’en tirer le meilleur, pour révéler ensuite le potentiel de cette récolte grâce à la précision de notre chai gravitaire.
Les précipitations très importantes sur la période (700mm cumulés) permettent au sol de se recharger largement, et même au-delà, nous incitant à un travail de précision accrue de nos sols, plus précoce qu’à l’accoutumée.
En parallèle de cette humidité, les températures fluctuent : elles démarrent par une période plutôt douce, qui amorce une avance dans le millésime et déclenche un début de débourrement précoce de dix jours vers le 17 mars, assez hétérogène du fait de la période plutôt fraiche qui a suivi. Un travail des sols très précoce à la fin du mois de février, contre la mi-mars habituellement, aura permis d’aider les sols à se réchauffer plus vite et à limiter cette hétérogénéité.
Les précipitations reprennent en avril mais les températures restent plutôt douces, confirmant la précocité du millésime, mais faisant craindre dans le même temps pour l’état sanitaire de la vigne et la qualité de la floraison.
Heureusement, le temps devient particulièrement sec et chaud à la mi-mai, favorisant une floraison extrêmement rapide et homogène, notamment de nos vieux Merlot, dès le 21 mai. Cette floraison, non sans rappeler le millésime 2005, donne naissance à un nombre de pépins par baie particulièrement élevé.
Après quelques épisodes pluvieux, les conditions virent à partir de la mi-juin vers un temps sec, qui génère finalement un stress hydrique crucial dans la maturation des raisins : en 55 jours ne sont tombés que 5mm de pluie. Ce temps sec s’accompagne de températures relativement fraîches jusqu’à la mi-juillet.
Dans ce contexte, nous décidons de procéder à un effeuillage minutieux (uniquement du côté du soleil levant) et précoce le 15 juin, pour favoriser la synthèse phénolique des raisins. En parallèle d’une remontée sensible des températures, le début de la véraison intervient dès le 15 juillet, toujours de façon avancée.
Le 12 août, des précipitations opportunes interviennent (60mm), suffisamment importantes pour relancer la maturation sur les sols graveleux mais pas assez pour influer négativement sur les sols argileux. Avec une humidité plus importante mais une chaleur toujours égale, les 10 jours qui suivent sont assez préoccupants pour l’état sanitaire des raisins.
Néanmoins, la position privilégiée du vignoble de Cos d’Estournel, qui permet une ventilation constante, le travail d’effeuillage, la présence continuelle de nos équipes, et surtout un été indien à partir du 29 août jusqu’aux vendanges, permettent une maturation des raisins dans les meilleures conditions.
Dans le contexte d’un millésime assurément précoce et d’un mois de septembre très chaud, les vendanges sont déclenchées tôt : les blancs sont ramassés dès le 31 août et les rouges dès le 10 septembre. La connaissance de nos terroirs et notre appréciation de la précocité du millésime nous poussent à commencer tôt pour préserver la tension et l’énergie des raisins, et à terminer les vendanges le 24 septembre, avant les pluies qui reprennent alors, pour en garder l’exceptionnelle densité.
Pour ce millésime 2020, les Merlot présentent une douceur et une fraîcheur aromatique remarquables, avec une énergie apportée par des tanins de pépins abondants, soutenue par un niveau d’alcool bas. On obtient ainsi, fait rare, l’aromatique d’un millésime équilibré et frais, aux côtés d’une acidité plutôt douce, typique des millésimes chauds. Les Cabernet, très petits car favorisés par un stress hydrique optimal tout le long de leur maturation, sont incroyablement puissants et corsés, avec beaucoup de caractère.
